Son principal atout tient au fait que les cotisations sont déductibles fiscalement. Mais c’est pour moi (sauf pour un client fortement imposé… et pas comme solution principale) insuffisant pour compenser les inconvénients de ce genre de support.
Les inconvénients qui me détournent de la rente :
Aucune disponibilité en capital n’est prévue, même à la retraite (c’est ce que l’on appelle un contrat tunnel : une fois que l’on y est entré, on ne peut plus en ressortir et on est entièrement dépendant du bon vouloir et de la santé de l’assureur, comme je vais vous l’expliquer plus loin). Ainsi, si je dois aider mes enfants, je ne peux pas compter sur cette épargne, si j’ai un problème de santé qui doit raccourcir ma durée de vie, je ne peux pas décider de consommer mon capital plus rapidement pour « profiter de la vie »… la rente continuera à être versée sans pouvoir en augmenter le montant jusqu’à mon décès.
En cas de décès prématuré, le capital est perdu, sauf si l’on choisit une option de réversion de la rente sur le conjoint, mais cette option fait baisser le niveau des rentes… et au final, après le décès du conjoint, il ne reste rien pour les enfants (je peux avoir cotisé pendant 20 ans, décéder deux ans après être parti en retraite et avoir réalisé le plus mauvais placement de ma carrière d’épargnant, même si je ne suis plus là pour le constater, mais j’aurais pu faire autre chose pour protéger mon conjoint et mes héritiers).
Il n’existe, contrairement aux apparences, aucune garantie sur le versement et le montant de la rente, je m’explique (je me lance ici dans un exercice compliqué qui va vous demander un peu d’attention) : un contrat retraite Madelin ou PERP est ce que l’on appelle un actif cantonné, c’est-à-dire qu’il fonctionne en circuit fermé (les bénéfices et pertes du contrat ne sont affectées qu’au contrat lui-même ce qui veut dire aussi que les bénéfices des autres contrats ne peuvent pas compenser les pertes du contrat… et c’est dommage car des pertes, il peut y en avoir là où on ne les attend pas).
Pour une compagnie d’assurance, il existe deux types de bénéfices et donc aussi de pertes : les bénéfices/pertes techniques et les bénéfices/pertes financiers. Pour cette dernière catégorie c’est facile à comprendre : je place de l’argent sur les marchés financiers et si cela se passe bien je fais des bénéfices, si le marché s’écroule (bourse par exemple), je subis des pertes.
Pour la partie « technique » je vais uniquement parler du contrat Madelin/PERP : au terme du contrat, l’assureur doit verser une rente à vie (rente viagère) à son client. Pour calculer cette rente, il se réfère aux tables de mortalité de l’INSEE et si, par exemple, il constate que l’espérance de vie à 65 ans est de 20 ans, il estimera sa rente comme s’il devait la verser pendant 20 ans. Ainsi, si son client décède au bout de 5 ans, l’assureur réalise un bénéfice technique, mais si son client vit 25 ans au lieu de 20, il subit une perte technique.
Prenons un exemple (certes très schématique mais cela me permet d’expliquer le mécanisme) :
Retraite à 65 ans, avec une espérance de vie INSEE de 20 et 120 000 € sur un contrat Madelin ou PERP :
L’assureur va me verser 500 € par mois et au bout de 20 ans, j’aurai épuisé toute ma réserve (500 x 12 mois x 20 ans = 120 000 €… ok, je ne tiens pas compte du fait que l’argent encore présent sur le contrat continue à travailler mais je ne tiens pas non plus compte du fait que la rente doit être revalorisée chaque année). Si je vis plus longtemps, l’assureur se servira des bénéfices techniques réalisés grâce à ses clients décédés prématurément pour continuer à me verser ma rente mais, si l’espérance de vie moyenne en France (donc l’espérance de vie de tous ses clients) augmente, que fera-t-il ? En fait, il aura deux solutions :
- Soit il s’en rend compte avant qu’il ne soit trop tard et il freinera la revalorisation des rentes versées (il existe un préalable célèbre mais caché par les médias : la retraite PREFON des fonctionnaires ne revalorise plus sa rente depuis plusieurs années, occasionnant une perte de pouvoir d’achat à ses adhérents de plus de 11 % par rapport à l’inflation sur les dix dernières années, liens ici :
http://www.epargneretraite.org/spip.php?article75
http://www.epargneretraite.org/spip.php?article93
- Soit il fera chuter brutalement le montant des rentes pour pouvoir continuer à les verser (un autre exemple : le système COREM (ex-CREF) a subitement diminué le montant des rentes versées de 17 % en 2001 et ne les revalorise quasiment plus depuis, occasionnant une perte de 15 % supplémentaire c’est-à-dire 32 % au total, lien ici :
http://www.epargneretraite.org/spip.php?article96)
A ce stade vous pensez peut-être : « Il est bien gentil mais alors, si ce qu’il dit est vrai, pourquoi personne n’en parle ? »
Parce que la loi Madelin datant de 1994 et le PERP de 2003, il y a encore beaucoup d’épargnants et peu de rentiers dans ce système. A titre de comparaison, le système PREFON date de 1964 et le CREF de 1951 (à l’époque, il s’appelait MRIFEN et est devenu le CREF en 1987) et il a fallu attendre les années 2000, c’est-à-dire le début du départ en retraite des « baby-boomers » pour que les difficultés de ces systèmes de retraites deviennent insurmontables. Je pense donc objectivement que, au vu de la pyramide des âges de la France, la loi Madelin va subir le même sort.
Cordialement
Patrick