L argus de l assuranvce
Le courtier spécialisé dans la vente d’assurance de téléphonie mobile est renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris pour « pratiques commerciales trompeuses ».
Nouvel épisode judiciaire pour l’ex-Sfam. Sept filiales du groupe rebaptisé Indexia et son fondateur, l’homme d’affaires Sadri Fegaier, sont renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris pour répondre des accusations lourdes de « pratiques commerciales trompeuses » et avoir fait « obstacle à un contrôle ». Un renvoi qui intervient après les conclusions accablantes d’une enquête de la DGCCRF transmises au procureur de Paris sur la base de près de 700 signalements de consommateurs mécontents collectés entre septembre 2019 et mai 2020.
Les accusations
Que reproche-t-on précisément à Indexia ? Dans le détail, le courtier, qui commercialise des services d’assurance de téléphones et d’ordinateurs ainsi que des cartes « privilèges » et des services de cashback, est accusé d’avoir ignoré les demandes de résiliation des consommateurs en poursuivant les prélèvements. « L’enquête de la DGCCRF a permis de constater des pratiques consistant à faire faussement croire aux consommateurs souhaitant faire cesser des prélèvements, résilier leurs abonnements et se faire rembourser les sommes prélevées (...) que leurs demandes étaient prises en compte, voire effectives », détaille la DGCCRF. Elle ajoute : « Les sociétés mises en cause sont suspectées d’avoir mis en place ces pratiques en vue de maintenir actifs un grand nombre de contrats pour une période artificiellement prolongée par rapport aux souhaits des consommateurs. »
En septembre 2020, une perquisition est même effectuée par la répression des fraudes dans les locaux d’Indexia à Romans-Sur-Isère (Drôme). Une procédure qui a permis de mettre à jour plusieurs éléments, dont un système de classification interne des clients en quatre niveaux de réclamation. Ces niveaux « induisent des traitements différenciés par les opérateurs en interne ». Ainsi, les réclamations dites « de niveau 4 » (niveau maximal dans la gradation interne) se traduisent par une « résiliation immédiate et remboursement si telle est la demande », peut-on lire dans l’ordonnance de la cour d’appel de Paris en septembre 2021. À l’inverse, « les réclamations de premier niveau ne sont pas traitées, sauf pour les clients Fnac, et la vérification de l’annulation et du remboursement est effectuée uniquement après relance du client ». Difficile d’estimer à ce stade le nombre de clients lésés. Un groupe Facebook intitulé « Arnaque Sfam » créé dans le sillage des révélations compte déjà plus de 2 000 personnes.
Indexia se défend
Contacté par L’Argus de l’assurance, Indexia affirme que cette assignation – dont ils n’ont, pour l’instant, pas eu de notification – s’inscrit dans le cadre de la procédure de contrôle dont le groupe fait l’objet depuis 2019. « En matière de résiliation, nous allons bien au-delà de nos obligations légales, se défend Jean-Pierre Galera, son directeur général adjoint. Le groupe a mis en place les conditions les plus flexibles possibles pour faciliter au client la gestion de son contrat, pour qu’il puisse appréhender les services avant de s’engager. Toute demande de résiliation et d’annulation est prise en charge et traitée dans les meilleurs délais. Tous les retours clients sont pris très au sérieux et sont traités par la société. Nous tendons vers le zéro défaut. »
Une première amende de 10 M€ en 2019
Ce n’est pas la première fois qu’Indexia se trouve dans le collimateur de la DGCCRF. En 2019, la répression des fraudes avait déjà mené une première enquête mettant en cause les méthodes de vente d’assurances de téléphonie mobile chez Fnac. Des méthodes « constitutives du délit de pratiques commerciales trompeuses ». Afin d’éviter une condamnation, le groupe, avec l’accord du procureur de la République de Paris, s’est engagé à régler une amende transactionnelle de 10 M€, « proportionnée à la gravité des pratiques ». Il s’agissait d’indemniser des consommateurs ayant formulé une réclamation auprès de Sfam ou de la DGCCRF.
Que risque Indexia ?
Dans ce type de procédure et selon les faits reprochés, les sept filiales encourent une amende de 1,5 M€. Par ailleurs, le montant de l’amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires (article L. 121-2 du code de consommation). Une somme qui peut s’avérer considérable puisqu’en 2021, Indexia a enregistré un chiffre d’affaires de 1,1 Md€ (+ 10 % par rapport à 2020). S’il est mis en examen par le parquet, son PDG encourt, quant à lui, une peine allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement et une amende maximale de 300 000 €.
Une autre procédure
Cette procédure au pénal intervient au moment où le courtier fait l’objet, depuis juin, d’une autre action au civil au tribunal judiciaire de Paris. Le 27 juillet dernier, une trentaine de clients, qui reprochaient au courtier de nombreux prélèvements inexpliqués sur leur compte, a obtenu gain de cause : une provision de 6 400 € correspondant à l’ensemble des prélèvements sur cinq ans d’un client qui avait signé un contrat en 2011, ainsi que 1 000 € au titre des frais d’avocat et la communication sous astreinte de 100 € par jour de la copie des contrats. Selon nos informations, une partie de ces clients lésés ainsi que l’association de consommateurs UFC-Que Choisir se constitueront partie civile dans l’hypothèse où se tient un procès au pénal.